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Obnubilés par le décryptage du calendrier, les chercheurs en oublient que les dates...
datent quelquechose !


Si les premiers déchiffreurs s'attardent tant sur les chiffres et le calendrier, c'est parce que leurs travaux prennent pour base les informations de Landa. Certains, comme Brasseur de Bourbourg et Léon de Rosny, ont essayé de comprendre et d'appliquer le fameux "alphabet", mais en vain. D'autres, comme Förstemann et Goodman, ont commencé par rechercher et identifier, dans les inscriptions des codex et des monuments, des glyphes de jours et de mois. Partant d'éléments calendériques, ils en ont déchiffré d'autres et sont arrivés peu à peu à décrypter les différents cycles et l'usage qu'en faisaient les Mayas. Leur tâche était rendue plus facile par l'importance relative du calendrier dans les inscriptions : ainsi, près de la moitié des caractères du "Panneau des 96 glyphes" de Palenque sont calendériques, ce qui n'est pas exceptionnel.

Les chercheurs ont donc tendance à privilégier ce qu'ils commençaient péniblement à comprendre, au détriment des parties de l'inscription qui restaient "muettes". Comme on a découvert assez vite que les Mayas érigeaient des stèles sculptées d'inscriptions à intervalles réguliers (le plus souvent tous les cinq ans), on a parlé de "culte des stèles". On a fait des Mayas des adorateurs du temps, et appelé abusivement "dieu" oute forme anthropomorphe de glyphes donnée à des périodes ou à des chiffres.


Les textes apparaissent rarement seuls : le plus souvent, sur les codex comme sur les monuments, ils accompagnent ou sont accompagnés par des images

D'une interprétation correcte de ces images on peut espérer une aide au déchiffrement des glyphes qui leur sont associés, et vice versa... si tant est qu'il y ait un rapport entre texte et image, le premier commentant la seconde, et celle-ci illustrant l'inscription. Mais on peut attendre aussi beaucoup plus de la compréhension et de l'interprétation des images : une quantité d'informations sur les Mayas eux-mêmes, leurs coutumes et croyances. Toutefois, avant d'interpréter l'image, de comprendre le sens des différent motifs qui la composent, il faut d'abord "voir" c'est-à-dire reconnaître et identifier ces motifs. Autrement dit, avant de chercher à déterminer la signification du serpent, il faut d'abord reconnaître le serpent dans l'image. Et ce n'est pas toujours facile, même pour le spécialiste : les représentations mayas ne sont pas des copies de la nature et ne cherchent pas à être "réalistes".

Elles n'expriment pas ce qu'on voit, mais ce que l'on sait, si bien que l'aspect réel de la chose représentée va être modifié jusqu'à perdre presque tout de son apparence première. Les artistes mayas vont changer les proportions, mettre des glyphes dans les yeux, décharné une mâchoire, munir un serpent de larges ornements d'oreille en jade, dessiner l'aile d'un oiseau comme une mâchoire de reptile.
En outre, le décodage est souvent rendu plus difficile encore par l'accumulation et l'imbrication des motifs qui composent une image. Certains reliefs mayas, à première vue, ressemblent à un plat de nouilles : des formes enchevêtrées dans tous les sens, sans le moindre "blanc". L'oeil est perdu, ne distingue rien. On a parlé d'"horreur du vide"; il s'agit plutôt de la volonté d'exprimer le plus possible, sans hésiter répéter plusieurs fois le même "message", généralement sous des formes différentes.